Five Leaves Left (1969) – 110 jours, 474 albums

Nick Drake - Five Leaves Left (1969)Le folk personnel de Nick Drake est sensible, touchant, délicat. Five Leaves Left est un de ces petits trésors qu’on a l’impression d’ouvrir, et qui contient une quantité infinie de souvenirs uniques, nostalgiques.

La voix de Drake est douce, suave. Sa simple guitare occupe tout l’espace, mais est parfois aidée de violons, comme sur le mélancolique River Man. Si ce n’était de la voix réconfortante de Drake, on en pleurerait. Day Is Done a aussi ce charme unique, qui allie une orchestration subtile, une mélodie qui fait frissonner votre cœur et, encore, cette voix unique. On se sent démuni devant ce morceau.

Pourtant, Drake est toujours mesuré, jamais poignant. Et pourtant, votre cœur en ressort serré, serré…

Bayou Country (1969) – 110 jours, 474 albums

Creedence Clearwater Revival - Bayou Country (1969)Pour un savoureux mélange de country terreux et de bon rock des années 60, Creedence Clearwater Revival est le groupe vers lequel se tourner. Bayou Country porte bien son nom, avec son ambiance de blues, de guitares acoustiques et de chant country.

Le morceau éponyme est plutôt décontracté, il prend son temps, mais a toute la puissante du blues et du rock bien senti. Graveyard Train s’étend sur un 8 minutes 30 d’harmonica, de contre-basse folk et d’émotions blues. Et Good Golly Miss Molly est à un classique du rock & roll, avec toute sa fougue et des guitares plus lourdes.

Joan Armatrading (1976) – 206 jours, 482 albums

Joan Armatrading - Joan Armatrading - 1976Un chant suave, profond, féminin, et pourtant léger, pop par moment: Joan Armatrading surprend sur son album éponyme. Un doux assemblage de folk, de rock & roll et de culture noire en un album bien agréable.

L’auteure/compositrice/interprète est de ceux qui ont suivi l’inspiration de Bob Dylan: compositions personnelles, intimes, simples. On sent quelques moments plus énergiques, où ressort davantage le rock. Mais on se concentre davantage sur la guitare acoustique folk et la voix sensuelle, afro-américaine de la chanteuse. Celle-ci a même quelques inflexions R&B et soul.

Help Yourself est une perle lente, touchante, travaillée. Love and Affection va du côté de la balade, avec une belle affection. Save Me serait déchirante si la chanteuse ne savait si bien contrôler sa voix. On dirait un cri du cœur étouffé. Join the Boys a presque quelque chose de hip hop, avec son rythme particulier, fragmenté. Puis c’est le funk qui arrive en force.

Une chanteuse fort talentueuse mais méconnue. Pourtant, son folk-rock afro-américain est unique.

Paul Simon (1972) – 220 jours, 500 albums

Paul Simon - Paul SimonLe duo d’auteurs/compositeurs Simon and Garfunkel a marqué la musique des années 60 avec ses balades. La carrière solo de Paul Simon n’est donc pas passée inaperçue. Quelques albums figurent dans ce défi. L’éponyme Paul Simon y figure, avec un mélange de soft rock et de folk-rock bien personnel.

Ne cherchez pas de hits ici. Il s’agit plutôt de morceaux calmes, lents, doux. Everything Put Together Falls Apart est d’une grande simplicité, avec sa guitare acoustique, la voix proche de Simon et quelques notes de basse, à peine. Duncan est légèrement plus énergique, mais on se croit toujours au bord d’un feu de camp, les flûtes de pan en plus. Me and Julio Down the Schoolyard est plus accrocheur et mouvementé avec sa guitare acoustique grattée fébrilement. Le court Hobo’s Blues est aussi assez appréciable avec son violon style manouche. Enfin, Congratulations reprend un peu le fameux wall of sound, créant une ambiance enveloppante.

Un soft rock intéressant, qui gagnerait à être écouté plusieurs fois.

Blue (1971) – 221 jours, 504 albums

Joni Mitchell - BlueAvec son chant folk et émotif aux accents jazzy, Joni Mitchell est une artiste écoutée avec passion par plusieurs. Blue est un des quelques albums de l’artiste qui se trouvent dans ce défi: signe que l’artiste jouit d’une grande reconnaissance.

Mais comme avec plusieurs autres voix du vocal jazz, l’attachement d’un auditeur envers un artiste est souvent une question de personnalité. La voix toute particulière de Mitchell, avec ses inflexions et son timbre plus aigu, et son chant personnel et intime peuvent en laisser plusieurs indifférents. Alors que pour d’autres, ce sera le coup de foudre. Après une écoute plus prolongée (trois ou quatre écoutes), on finit tout de même par s’attacher.

My Old Man est particulièrement émotive. Le discret piano laisse toute la place à la voix, ici de virtuose, de Mitchell, avec des inflexions tourmentées et mélancoliques. Little Green fait place à une simple guitare acoustique et la voix est plus posée, mais toujours dans une ambiance bleue. Blue est très intime et frissonnant. California donne davantage dans le folk, comme le plus énergique This Flight Tonight.

Si vous n’accrochez pas tout de suite, donnez-lui une deuxième chance: on s’entiche assez facilement, sans que cela ne doive devenir l’amour fou. Le folk sauce jazzy est fort appréciable, et la douceur de Joni Mitchell n’est pas à ignorer. Mais il est aussi possible que vous aimiez, beaucoup, dès les premières notes.

Come On Feel the Illinoise (2005) – 224 jours, 509 albums

Sufjan Stevens - Come On Feel the IllinoiseUn monde de rêveries et de couleurs, teinté de chamber pop aux violons et à l’instrumentation classique et de folk-rock indie: c’est ce qu’offre Sufjan Stevens sur son album Come On Feel the Illinoise (ou Illinoise pour les intimes). Une musique personnelle et intime. Une perle à découvrir.

Le folk mesuré de Jacksonville m’a fait rêver de grands chemins, de prairies et de soirées à la campagne. Chicago m’a donné des frissons avec ses violons et sa voix à fleur de peau. La composition a un quelque chose de rêveur, de fabuleux, de divin. Le morceau ressemble à une confession innocente et à une aventure épique à la fois.

Et que dire du piano! Il traverse tout l’album avec ses notes claires, ses accords bleus, son jeu parfois joyeux, parfois mélancolique. Il expose toute sa splendeur dans le frissonnant The Seer’s Tower: un morceau qui m’a tiré quelques larmes.

Tout l’album est une merveille, un sac au trésor où se cachent des rêves, des couleurs (souvent bleues), des cieux au crépuscule ou à l’aube. Il est habité milliers d’instruments: autant de violons, de vibraphones, de tambours, de guitares, de chant qu’il est possible d’en rêver. Il séduit dès le piano mélancolique de Concerning the UFO Sighting Near Highland, Illinois, et nous transporte tout l’album durant, sans jamais nous laisser retomber au sol. On se sent un peu comme Peter Pan, qui aurait connu une peine d’amour.

En bonus:

Fuzzy (1993) – 225 jours, 512 albums

Grant Lee Buffalo - FuzzyPlusieurs genres et styles musicaux permettent de faire vivre des émotions intenses et intimes. Le country s’y prête en particulier, mais il peut paraître trop plaintif pour certains. Grant Lee Buffalo s’en inspire juste assez et comble les trous avec du rock indie. Le résultat sur Fuzzy est son qui rappelle la tourmente du goth rock: quelque chose de sombre, de profond, de personnel.

Dès que débute la mélodie de The Shining Hour, on sent cette tourmente. On sent quelque chose de triste, de dramatique. Mais jamais l’artiste ne cède à l’émotion. Sur Jupiter and Teardrop, l’atmosphère devient plus poignante, mais à peine. On ralentit plutôt le rythme, pour faire perler une larme. Fuzzy est assez introspectif, presque plaintif. Wish You Well est également une perle d’émotion bien sentie.

La musique ressemble à du rock indie lent, auquel on aurait ajouté quelque chose de délicat. C’est le country. Il amène tout un flot d’émotion, mais que Grant Lee Buffalo prend bien soin d’endiguer, pour ne laisser filtrer qu’un mince filet.

Buenas Noches from a Lonely Room (1988) – 229 jours, 520 albums

Dwight Yoakam - Buenas Noches from a Lonely RoomLe country n’est pas accessible à tous. Ses mélodies larmoyantes et ses paroles mélancoliques en rebutent plus d’un. Pourtant, le genre a une profondeur émotive bien appréciable, et Dwight Yoakam nous l’a rend accessible avec Buenas Noches from a Lonely Room.

Son country alternatif amène quelque chose de pop et de moins dépressif à la musique. Bien sûr, l’essentiel reste là: violons campagnards, voix qui casse, honky tonk et guitares électriques caractéristiques. Mais on sent aussi l’effort de sortir des ornières du rang et d’amener de nouveaux auditeurs au patelin.

I Got You a quelques influences rock, mais demeure authentique. What I Don’t Know va un peu plus loin avec une batterie sentie et une guitare plus affirmée. Home of the Blues rappelle la familiarité entre les deux genres. I Sang Dixie est plus émotif, alors que Send Me the Pillow s’apparente à une balade où le rythme rappelle un cheval déambulant calmement.

I See a Darkness (1999) – 284 jours, 544 albums

Gris, lourd, déprimant: pour l’album I See a Darkness de Bonnie « Prince » Billy, ces adjectifs sont des compliments. Et pourtant, ce country alternatif parsemé de rock indie a quelque chose de profondément lumineux. Un peu comme la minuscule flamme d’une chandelle plongée dans l’obscurité.

Bonnie %22Prince%22 Billy - I See a Darkness

On sent le country, mais à peine. Il se cache dans l’ambiance dépressive, dans certaines inflexions de la voix, mais on est loin du honky tonk et des campagnes de Buck Owens. L’émotion n’en est pas moins viscérale et déchirante. La montée finale de Nomadic Revery (All Around) donne la chaire de poule. Et pourtant, le début est introspectif, méditatif. C’est le cri d’une âme désespérée et affaiblie.

On sent aussi le rock, mais plutôt le goth rock et ses paysages sombres, rappelant un morceau punk qui aurait perdu son énergie et sa vitalité. Sur Death to Everyone, c’est à s’y confondre. La dépression est rendue admirablement belle.

Il subsiste tout de même un quelque chose de pop, d’abordable, de presque badin dans certains morceaux, et qui contraste avec l’ombre qui plane sur cet album. A Minor Place est entre la balade et le chagrin sur le bord de déborder. Madeleine-Mary est l’assemblage parfait entre une mélodie rock et les blessures lamentables du country.

Avec un tel exercice musical, le country vient définitivement toucher au cœur: on comprend plus que jamais sa pertinence, sa profondeur et sa force narrative et émotive.

Dire Straits (1978) – 292 jours, 556 albums

Un rock simple agrémenté d’une guitare électrique douce, avec une nuance de f0lk: l’album éponyme de Dire Straits est une découverte qui s’écoute parfaitement sur une longue route, avec un soleil haut, une légère brise et un air juste assez chaud.

Dire Straits - Dire Straits

Le rock, vraiment, n’est que dans la structure, mais certes pas dans l’ambiance. Il s’agit plutôt de balades, de morceaux inspirés du folk, qui ont un quelque chose de campagnard, qui sent la terre, mais pas trop. L’ambiance est détendue, les rythmes, lents. Le rock ne vient qu’insuffler une énergie, un mouvement, histoire de rendre les morceaux accrocheurs et animés. Mais cette énergie dépasse rarement les 70 kilomètres/heure.

Chaque morceau semble avoir sa personnalité, le jeu de la guitare donnant du détail à souhait, mais sans tomber dans la complexité abusive: on demeure léger et abordable. On ne fait que passer un bon moment. Down to the Waterline et l’excellent Sultans of Swing sont plus énergiques, alors que des morceaux comme Water of Love et Six Blade Knife sont plus lents et introspectifs. Lions offre une perle de détails, de délicatesse, de précision. Bref, une composition exemplaire, qui nous fait souhaiter que l’album ne se terminerait pas de manière aussi impromptue.